Identité bretonne : une mise au point de notre correspondante Anne de B.

Notre correspondante Anne de B¹. rit de bon coeur, après avoir récupéré ce dernier dans le reliquaire d'or où elle le range d'ordinaire.

Elle vient de prendre connaissance de la réponse² adressée par le président du Conseil "régional" des Pays de la Loire à Jacques Lebreton de Vonne, responsable des relations extérieures de la fédération UDB de Loire-Atlantique, qui protestait contre la récente campagne de promotion de la région coquecigrue³.

Notre correspondante n'est pas choquée par le postulat de départ du président, qui constate en effet :

"Nantes est en Bretagne, nul ne saurait le nier. Elle l'est par ses racines historiques, et le château des Ducs est là pour en témoigner. Elle l'est aussi par la culture, il suffit de constater la richesse, la diversité et la dynamique des associations bretonnes dans les quartiers et dans l'animation des événements festifs."

C'est l'alinéa suivant qui amuse Anne de B. :

"Mais du fait de sa position géographique à l'embouchure de la Loire, et de son aire d'influence vers l'amont du fleuve, elle est aussi ligérienne. C'est une autre évidence. Elle présente donc un double visage ou mieux, une double appartenance territoriale."

Anne s'exclame :

"Gast ar c'hast⁴ ! C'est moi qui suis née à l'époque des grandes découvertes, mais celle-ci vaut son pesant de sel ! Comment ce monsieur peut-il distinguer la Bretagne du lieu où elle a pris corps historiquement et politiquement, quand le mot "France" n'existait pas encore ? La Bretagne est ici parce que la Loire y est. Parce que sa présence a entraîné la nôtre, progressivement pendant des siècles, par l'estuaire, puis à travers la péninsule et enfin avec l'installation du pouvoir ducal. Il n'y a pas plus de double visage que de double appartenance. La Loire est chez nous le visage de la Bretagne, comme la Sèvre, l'Erdre, le Sillon, le vignoble, la Brière, les tuiles de Retz ou ailleurs les îles ou les monts d'Arrée ! La Loire est bretonne depuis La Riottière comme la Seine est francilienne à Paris et normande à Rouen, la Garonne languedocienne à Toulouse et aquitaine à Bordeaux ou le Rhône provençal à Marseille !  Le reste est manipulation.

Ce Monsieur Auxiette n'aurait pas dû se reconvertir dans l'Histoire et Géo⁵ ! C'est un métier.

Dans sa réponse au responsable UDB, Jacques Auxiette s'étend sur le caractère "administratif" des régions, qui servent de cadre à des "politiques publiques" dont il énumère divers effets dans la circonscription qui l'intéresse. Anne de B. hausse discrètement les épaules :

Une partie des impôts que nous payons nous revient ? Encore heureux ! La vraie question est celle du meilleur cadre pour gérer nos affaires. Et si je peux me permettre cet anachronisme, il n'y a pas photo !

Mais cette "influence en amont de la Loire" ?

Il y avait de mon temps beaucoup plus de bateaux qu'aujourd'hui à remonter jusqu'à Saumur et même Tours. Personne n'en tirait argument pour minimiser la bretonnité de Nantes !

Et des cinq chefs-lieux des "Pays de la Loire" de M. Auxiette, un seul est bâti sur la Loire. Un seul⁶. Et c'est Nantes !

Derrière la fiction "ligérienne", il y a une réalité : c'est la route de Paris, que Paris veille à privilégier dans toutes les régions, et dont Paris profite sans vergogne au détriment des solidarités territoriales, grâce à des amis comme lui.

Tiens, remets-moi donc un petit muscadet... Un vin administratif, ça ?

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^1. Photo : détail de la statue en pied posée près de l'entrée du château des Ducs de Bretagne (bronze de Jean Fréour).
²  Pour lire la réponse, cliquer ici.
³. Coquecigrue : animal mythique composé de parties d'animaux différents
⁴ Anne de B. fréquente les cours de Kentelioù an Noz.
⁵ J. Auxiette a été prof de maths au lycée de la Roche-sur-Yon, avant d'y être censeur, puis proviseur.
⁶ Angers est sur la Maine, qui se jette dans la Loire à Bouchemaine, quelques kilomètres plus loin.